Metal Gear Solid Ground Zeroes

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C’est officiel depuis une grosse semaine : MGS V : Ground Zeroes est désormais en circulation sur les linéaires de la distribution française. Un prologue qui a déjà fait suffisamment couler l’encre sur l’aspect apéritif qui s’en dégage, n’étant qu’un morceau du futur et définitif MGS V : The Phantom Pain, prévu lui dans au moins un an.

Il y a cinq ans pourtant, bien avant l’annonce de ce Metal Gear Solid nouvelle génération, son créateur Hideo Kojima pensait déjà avoir trouvé le cinquième opus canonique de sa saga. L’élu serait MGS Peace Walker sur PSP, itération mineure qui n’aura finalement jamais les honneurs d’être inséré dans la nomenclature officielle de la série. Et s’il ne manque pas de qualités, il n’en a, de toute façon, jamais eu les épaules…

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Les enfants terribles, et les autres

Du marketing, vraiment ? Lorsque Hideo Kojima s’ouvre au monde sur son idée d’adouber son prochain titre sur PSP en le numérotant comme une suite officielle (mais pas directe) à Metal Gear Solid 4 : Guns of the Patriots, personne n’est vraiment dupe. Entre 2007 et 2009, on sait le créateur japonais investi sur la portable de Sony, lui-même étant sans doute conscient que cette décision technologique ne vaudrait pas à son travail la même notoriété que s’il publiait ses jeux sur une console de salon. Mais Kojima semble tenir à sa trouvaille, comme une bravade aux fans, ainsi que le prouvent les premiers visuels et logos – il est bel et bien question de Metal Gear Solid V : Peace Walker. Une certitude cependant : le changement de nom qui interviendra plus tard est peut-être donc un désaveu, ou encore un coup de bluff, mais certainement pas une surprise ; d’aucuns se souviennent que Metal Gear Solid 2 sur PS2 avait, lui-même, été un temps envisagé comme le troisième opus de la sous-série « Solid », puis rebaptisé.

Toujours est-il que Peace Walker est tout de même entré dans la chronologie officielle, bien que dépourvu du suffixe numéroté qui lui aurait conféré une aura, une symbolique et des ventes bien supérieures. A titre de comparaison, Metal Gear : Ghost Babel ou encore Metal Gear Ac!d sont eux considérés comme des épisodes parallèles. Ac!d, lui aussi sorti sur PSP, était un simple jeu de carte au tour par tour, Kojima estimant alors qu’un véritable MGS ne saurait s’adapter à un format portable. Énième demi-tour : deux ans après suivait, pourtant, Metal Gear Solid : Portable Ops.

Fort d’un petit succès d’estime, ce dernier semble bien être l’exception qui confirme la règle. Malgré sa labellisation « Metal Gear Solid », qu’il conservera jusqu’au bout, l’épisode ne sera jamais totalement assumé par Hideo Kojima (le titre est ainsi absent de la totalité des compilations), celui-ci estimant que les événements du jeu (qui se déroulaient directement après l’épisode PS2 MGS 3 : Snake Eater) entravaient le récit imaginé par le Japonais. Une volte-face déjà curieuse pour celui qui déclarait attendre l’écriture du script du jeu avant de passer à celui de… MGS 4 sur PS3. Mais Kojima marque son retrait de Portable Ops ; vous ne trouverez ainsi pas la mention « A Hideo Kojima Game » sur la jaquette, Noriaki Okamura (producteur de Metal Gear Solid : Digital Graphic Novel et réalisateur de Zone of the Enders) enfilant le costume de producteur et Shinta Nojiri (réalisateur des deux Ac!d) celui de réalisateur.

Les médailles, mais pas la gloire

Bon jeu PSP par ailleurs, Peace Walker a donc ceci de particulier qu’il est une brique reconnue des soixante ans d’histoire qui séparent tous les épisodes de la franchise Metal Gear. Or, quel élément fort se dégage du titre ? Le recrutement de soldats afin de constituer une armée ? Déjà vu, et sur certains points mieux exploité dans Portable Ops. La gestion des troupes ? Un point fort de Metal Gear Solid : Peace Walker… qu’on ressentait déjà dans Portable Ops. Le résultat est plus diversifié, c’est vrai, avec l’implémentation de la Mother Base (le foyer de l’armée de Big Boss) et la construction d’un véritable Metal Gear, mais la constitution d’une armée était mieux intégrée dans l’épisode renié. On peut voir ses frères d’armes tout au long de l’aventure dans Portable Ops alors qu’ils ne font que de brèves apparitions dans PW.

Alors que l’on pouvait utiliser ses soldats pour remplacer Snake sur le terrain dans Portable Ops, en surveillant les capacités et faiblesses de chaque membre, l’option est sévèrement bridée dans l’autre épisode PSP. De même, les recrues sont plus aisées à convertir grâce au ballon Fulton, transférant immédiatement votre candidat jusqu’à la base, alors qu’il fallait péniblement porter sur vos épaules les soldats assommés dans MGS : PO. Autant dire qu’on y réfléchissait à deux fois avant de s’infiltrer avec un corps à traîner, mais ça permettait au moins de sélectionner avec soin ses camarades. Pire, aucune innovation n’apparaît dans Peace Walker, qui reprend les éléments de gameplay de MGS3 en moins touffu, avec une position de marche basse empruntée à MGS 4 sorti deux ans plus tôt, en abandonnant la possibilité de ramper (!). On notera tout de même l’apparition d’un codec intégré, qui permet de discuter sans mettre le jeu en pause, mais celui-ci s’avère moins riche et intéressant qu’à l’accoutumée.

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Blasphème et racolage

Plus grave, les combats contre les boss, un des points de relief de la série, sont ici bien monotones. La torture mentale de Pyscho Mantis, le face-à-face sous un déluge contre Olga, le duel à mort contre The End ? Rien de tout cela ici : sans Peace Walker on ne combat que de grosses machines, sans charisme (logique) mais aussi sans intérêt. Chaque boss se résume à repérer le point faible se distinguant en rouge et à lui envoyer un maximum de roquettes, tout en esquivant une salve de missiles dans une grande arène. Ces combats ayant vraisemblablement été pensés pour le multijoueur, dans le sillage du phénomène Monster Hunter (la série adorée par le fils de Kojima, qui se cogne prodigieusement de celle de son papa), les boss sont longs à faire tomber, difficiles au premier abord, et assez ennuyeux.

Même Portable Ops, pourtant bien en deçà des standards de la série, fait bien mieux que ça, avec un casting de personnages nettement mieux intégrés à la mythologie de la série. Y apparaissent en effet Campbell (le futur Colonel de MGS 1), le jeune Gray Fox, et surtout Gene, le grand antagoniste du jeu. Formé pour être le successeur de The Boss, il a monté une armée qui le suit grâce à son charisme naturel. Quant à Snake, ou Big Boss, sa personnalité y semble paradoxalement plus complexe, creusée par les doutes sur sa mission et sa condition de soldat. Une dualité bien plus engageante que les faux enjeux mis en oeuvre dans Peace Walker, ses références faciles avec le père d’Otacon, où l’on va même déranger The Boss dans la tombe où elle repose depuis MGS 3 : Snake Eater, pour faire de la figuration sous une improbable forme immatérielle. Blasphèmes, racolage, clins d’œils échafaudés comme des châteaux de cartes… non, Peace Walker ne recule devant rien.

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Quant aux personnages de Paz et Chico, que l’on retrouvera dans MGS V : Ground Zeroes (la suite chronologique de MGS : PW)… la première attendrit Snake dans un premier temps pour mieux le trahir dans ce qui restera probablement la conclusion la plus insipide de la série. Le second passe son temps à tantôt pleurnicher dans vos jupons, tantôt jouer les durs, ou à se terrer dans le remords après avoir balancé ses camarades. Attachement zéro, comme le personnage du même nom qui surnage péniblement dans cet océan de nonames ratés ou sous-exploités. Lui qui était autrefois dans le camp de Snake, s’oppose maintenant à lui. On devine qu’il va bientôt façonner les patriotes tels qu’on les connait dans MGS 2, mais – hélas – on ne le voit intervenir à aucun moment dans les événements ; tout juste est-il évoqué au détour de conversations.

Inévitablement, Peace Walker ne saurait décemment accoucher une bonne histoire de personnages aussi creux. C’est bien simple, jamais le scénario d’un Metal Gear ne s’était autant employé à vous décourager de finir la mission, même s’il faut bien rappeler que le titre a de nombreuses qualités que son appellation d’origine contrôlée suppose. Malheureusement, le retour de The Boss est une farce à laquelle on ne croit ni ne rit ; quant à l’émergence d’un modèle de Metal Gear nucléarisé, on la voit venir à peine le jeu sorti du sachet bleu Micromania. L’une des fins du jeu, qui nécessite de retrouver SIX FOIS le personnage de Zadornov, enchaîne sur la trahison de Paz qui vole le Metal Gear de Snake pour le retourner contre celui-ci. Laissée pour morte à la fin de Peace Walker, c’est sans excès de nostalgie qu’on la retrouvera dans Metal Gear Solid V : Ground Zeroes – un épisode qui, dans une trajectoire parfaitement inverse à celle de Peace Walker, a été lui canonisé en cours de développement. Une médaille, semble-t-il, un peu trop lourde à porter…

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